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Figure de l’agroécologie, Pierre Rabhi est mort à l’âge de 83 ans

Figure de l’agroécologie, Pierre Rabhi est mort à l’âge de 83 ans

L’écrivain et philosophe Pierre Rabhi, figure de l’agroécologie en France, cofondateur du mouvement Colibris, est décédé à l’âge de 83 ans des suites d’une hémorragie cérébrale, a appris l’AFP ce samedi auprès de sa famille.

Pour de nombreux écolos, plus qu’une figure, Pierre Rabhi était un sage dont la voix humaniste aux airs de paysan écolo portait en faveur de l’environnement et surtout contre le réchauffement climatique. En tant que conférencier, il appelait à « l’insurrection des consciences ». Tout ceci pour un seul objectif : celui de « fédérer ce que l’humanité a de meilleur et cesser de faire de notre planète-paradis un enfer de souffrances et de destructions ».

En lui, le moine bouddhiste Matthieu Ricard voyait un « frère de conscience ». Il sera plus tard adulé par l’actrice Marion Cotillard, l’écrivain Cyril Dion ou l’ancien ministre Nicolas Hulot. « Une des rares personnes qui m’ont aidé à me construire », avait confié l’ex-animateur de télévision.

Sans parti, militant de « la joie » plutôt que de « la décroissance » comme le décrivait ses critiques, Pierre Rabhi rejetait catégoriquement la notion de « développement durable ». Il jugait le terme comme « une niaiserie ajustée sur la croissance économique ».

Durant tout sa lutte, Pierre Rabhi aura publié une trentaine d’ouvrages dont les ventes s’élèvent à plus d’un million d’exemplaires cumulés. L’auteur de “Vers la sobriété heureuse”, vendu à plus de 460.000 exemplaires, était le promoteur d’un changement écologique appelant chacun « à faire sa part » plutôt qu’à changer le système productif.

Un artisan de sa propre vie

Le 29 mai 1938, le futur visage de la lutte agroécologique naît à Kenadsa, en Algérie. Dès sa jeunesse, l’homme construit peu a peu l’image d’un paysan empreint d’un retour à la nature et aux traditions. Très tôt, il est écartelé entre « modernité et tradition », quand son père le confie à une famille de colons français, afin de lui assurer une meilleure instruction. Rabah devient alors Pierre.

A l’usine, il rencontre Michèle, secrétaire de direction, avec qui il va partager sa vie et échafaudera son retour à la terre. Ce pionnier du néo-ruralisme s’installe en 1961 dans une ferme du sud de la France. Il est malgré tout accusé de privilégier une vision « imaginaire » de l’agriculture, au mépris des sciences agricoles, qui, appliquée à grande échelle, ne serait pas pérenne pour nourrir la planète.

Il découvre l’agriculture biologique et écologique. Une pratique agricole visant à régénérer le milieu naturel en excluant pesticides et engrais chimiques et appliquée dès les années 1980 en Afrique sub-saharienne, où il effectuera de nombreux séjours.

En 1972, il met en pratique tout ce qu’il a appris, toutes les méthodes sur l’agriculture et l’élevage, dans sa ferme. En 1988, Pierre Rabhi est reconnu expert international pour la sécurité alimentaire et la lutte contre la désertification ; une reconnaissance en sorte de consécration. Il participe dès lors à des programmes dans le monde entier, notamment sous l’égide de l’ONU.

Référence dans le milieu écologiste, celui qui fût l’ami du légendaire violoniste Yehudi Menuhin, a connu une certaine exposition médiatique en 2002, lors d’une candidature à la présidentielle, pour déjà “introduire dans le débat l’urgence écologique”. Toutefois, il est contraint de renoncer, n’obtenant que 184 parrainages d’élus sur les 500 nécessaires à sa candidature. Il crée, par la suite, le « Mouvement Appel Pour une Insurrection des Consciences » (MAPIC).

Pierre Rabhi fonde en 2007 le mouvement Colibri, dirigé dans un premier temps par le réalisateur Cyril Dion, figure de proue des marches pour le climat et un des garants de la Convention citoyenne pour le climat.

Père de cinq enfants, il partage ensuite son temps entre interviews, animation de ses fondations, conférences et rédaction d’ouvrages…

Nombreuses réactions après sa disparition

“Parfois présenté comme un technicien, il s’intéressait à l’intériorité des gens”, a souligné son fils Vianney auprès de l’AFP. “Il a touché de nombreuses personnes”.

L’association écologiste qu’il a créée lui a rendu hommage, sur Twitter : « Pierre, tu as inspiré des millions de gens à travers le monde. Nous allons continuer à faire notre part, plus que jamais. Ton sourire restera à jamais dans nos cœurs »

Des personnalités politiques ont également eu quelques mots à l’égard de cette figure médiatique : « Cher Pierre Rabhi vous nous manquez déjà terriblement, une tristesse profonde nous envahit. Laboureur de la terre et laboureur des consciences, vous nous avez appris l’humilité dans l’immensité de la tâche », a ainsi écrit Ségolène Royal, sur Twitter, quelques minutes après l’annonce de son décès.

« La disparition de Pierre Rabhi est celle d’une figure emblématique du combat pour l’environnement et contre le réchauffement climatique. Avec humilité et franc-parler à la fois, il incarnait une facette de l’écologie qui restera une inspiration pour beaucoup », a également déclaré Renaud Muselier, président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et membre des Républicains.

Le penseur était aussi un grand admirateur de Socrate. Né aux portes du Sahara algérien, Pierre Rabhi restera comme l’un des pionniers de l’agroécologie.

Pierre Rabhi (1938-2021)

« Chaque être humain doit tenter de se connaître de façon à se changer positivement. »